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mardi 27 avril 2010

Un joueur de légende: Raúl Gonzalez Blanco


29 octobre 1994: un gamin nommé Raul Gonzalez Blanco entre sur la pelouse de Zaragoza. A 17 ans et 124 jours, c'est la première fois qu'il porte la tunique immaculée du Real Madrid.
15 avril 2000: Raul inscrit son 100ème but en Liga face à Zaragoza.
25 avril 2010: sur cette même pelouse de Zaragoza, Raul joue ce qui semble être son dernier match sous les couleurs de la Maison Blanche et inscrit son dernier but chez les Merengues. Blessé quelques minutes plus tard, il quitte en pleurs ses coéquipiers, épilogue tragique d'une carrière monumentale.

Si le destin avait suivi son cours normal, Raul aurait été un Colchonero, un matelassier. Comprendre un joueur de l'Atlético Madrid, rival honni du Real Madrid. En effet, le pater familias est un fervent habitué du Vicente Calderon et ne jure que par les rayures blanche et rouge. Alors sa progéniture n'a pas vraiment le choix: tu ne seras Rojiblanco mon fils.
Mais les méandres de la destinée font que les carrières peuvent prendre une tournure totalement inattendue. L'Atlético Madrid est alors la propriété du pour le moins controversé et néanmoins mythique Jesus Gil y Gil. Aussi bien connu pour ses magouilles en tous genres que pour ses punchlines particulières ("Qui est Jimmy Floyd Hasselbaink? Je m'en fous, je sais juste que c'est un gros noir qui marque des buts pour l'Atlético"), l'ancien maire de Marbella devenu sous son mandat davantage Mar-fea (mer moche: ce jeu de mots vous est offert) décide, pour des raisons de pesetas, de liquider les équipes de jeunes. Ou de l'art de se tirer une bastos de Magnum 357 dans le pied...
Du coup, RGB traverse la rue et file rejoindre les rangs des Merengues.

Pour sa première saison dans la cantera, Raul explique à tout le monde qu'il est l'avenir du club. Ses lignes de stats sont explicites: 71 galettes en 33 matches soit 2,15 pions de moyenne.

Avec de telles performances, pas surprenant de le voir prendre place dans la rotation de Jorge Valdano. Le flaco (le maigre) ne tarde pas à se mettre en évidence et délivre dès son premier match une passe décisive à Amavisca face à Zaragoza.
La semaine suivante, il dézingue le club de son padre et ouvre son compteur golazo d'une frappe pleine lucarne. Au cours de ce même match, il offre un but à l'Hélicoptère Zamorano et provoque un penalty. La vengeance est un plat qui se mange froid.
A la fin de la saison 1995-1996, le natif de San Cristobal de Los Angeles, un barrio pauvre de Madrid, est un titulaire à part entière qui a poussé Emilio Butragueno sur le banc, excusez du peu. Pas pour rien qu'il est élu révélation de l'année.

Sous les ordres de Fabio Capello, la saison 1996-1997 est celle de la confirmation. Avec 26 réalisations en 52 matches, Raul devient l'enfant préféré du Santiago Bernabeu à tel point qu'il gagne le surnom éloquent d'Angel de Madrid. Le trio offensif qu'il compose avec Mijatovic et Suker score 75% des goles de la Casa Blanca. Pour la deuxième fois de sa jeune carrière, Raul remporte la Liga, ce qui n'empêche pas Capello d'être écarté au profit de l'Allemand Heynckes.

Sa saison 1997/1998 est en demi-teinte. Raul connaît les blessures (pubalgie récurrente) et les à-côtés nocturnes qui lui valent des critiques dans la presse. Néanmoins, s'il finit l'exercice ante-Coupe du Monde avec seulement 10 buts, il remporte sa première Champion's League face à la Juventus (1-0 but de Mijatovic).

Equipe alignée ce soir-là: Illgner- Roberto Carlos, Sanchis, Hierro, Panucci- Seedorf, Redondo, Karembeu- Raul, Mijatovic, Morientes.

Malgré une Coupe du Monde calamiteuse pour la Roja avec une élimination fort peu glorieuse en phase de poule (3ème derrière le Nigéria et le Paraguay et devant la Bulgarie), Raul se remet dans le sens de la marche avec le maillot blanc et devient Pichichi de la Liga pour la première fois avec 25 bifsteaks en 37 matches devant Rivaldo (Ballon d'Or 199) et El Piojo Lopez.

La saison 1999/2000 est, à l'image de la saison 1997/1998, paradoxale pour le joueur et le Real Madrid. Irréguliers, les Madrilènes voient Vicente del Bosque succéder au Gallois John Toshack en novembre. Or, si la Maison Blanche échoue salement à la 5ème place du championnet, elle remporte la Champion's de main de maître face à un València CF totalement dépassé par les événements (3-0: Morientes, Mc Manaman, Raul).

Equipe alignée: Casillas- Roberto Carlos, Ivan Campo, Helguera, Karanka, Salgado- Redondo, Mc Manaman- Raul, Anelka, Morientes.

Raul achève sa saison avec 17 buts en 34 matches en Liga mais surtout 10 pions en Champion's dont un doublé à Old Trafford qui élimine le tenant du titre mancunien. Ainsi, il est élu meilleur attaquant des compétitions de clubs estampillées UEFA. Déjà en décembre 1999, il avait reçu le prix de meilleur buteur du monde.
Malgré sa forme éclatante, il manque son Euro avec son penalty manqué en fin de match face à la France en quart de finale qui empêche la Roja d'accrocher une prolongation in extremis.

A 23 ans, El Siete a déjà un C.V. bien fourni. La fin d'une époque car 2000 voit arriver les rêves de Florentino Perez et la génération des Galacticos.
La nouvelle ère commence dans la difficulté. Fanfaron comme pas deux, Perez annonce que le Real Madrid remportera les 5 compétitions dans lesquelles il est engagé. Caramba encore raté: défaites en Super Coupe d'Europe face à Galatasaray (2-1), en Coupe Intercontinentale contre Boca Juniors et élimination de Coupe du Roi face Tolède modeste club de Sugunda B.
Cependant, les Merengues retrouvent les joies des festivités à la Fontaine des Cibeles en remportant son premier titre de champion depuis 4 ans. Au passage, RGB redevient pichichi avec 25 goles (2ème Rivaldo, 3ème Javi Moreno)et conserve son titre de meilleur attaquant de la Champion's avec 7 galettes.
Néanmoins, il "échoue" à la 2ème place du classement du Ballon d'Or derrière Owen, la faute, selon Valdano, à un jeu trop austère et un sens du collectif qui pénalisent quand vient le temps des récompenses individuelles.

La saison 2000/2001 voit arriver Zidane de la Juventus, deuxième étape du projet galactique après la venue de Figo l'année passée en provenance du Barça.
A l'instar de la temporada précédente, les coéquipiers de Raul passent par tous les états. Pour le centenaire du club, le Real Madrid affronte le Deportivo La Coruna en finale de la Copa del Rey dans son antre de Santiago-Bernabeu. L'occasion est trop belle pour se ridiculiser. A l'arrivée, les Galiciens humilient les Merengues dans un match désormais le "centenariazo" surnom donné en référence au "Maracanazo" de 1950 quand le Brésil avait perdu la Coupe du Monde à domicile face à l'Uruguay.
Par ailleurs, bien que champion d'automne, les Galactiques se font chouraver le titre de champion par València et un certain Rafa Benitez, ancien patron des équipes de jeunes merengues.

Mais pour le centenaire du plus grand club du monde (selon l'UEFA), le Real Madrid touche le Graal aux Grandes Oreilles. Après un quart de finale légendaire face à Manchester United, la Maison Blanche touche à nouveau au sublime avec, en apothéose, la volée parfaite de Zidane en finale face au Bayer Leverkusen;
Auteur de l'ouverture du score, Raul remporte sa troisième Champion's en 4 ans.

Equipe alignée: César- Roberto Carlos, Hierro, Helguera, Salgado- Makelele, Figo, Solari, Zidane- Raul, Morientes.

Après une saison 2002/2003 pleine (16 buts en 31 matches de championnat et 9 en Champion's), El Capitan connaît 4 saisons moyennes , à l'image de son club, victime de sa politique baptisée "Zidanes y Pavones" (traduction des stars comme Zidane et des jeunes de la cantera comme Pavon à ne pas confondre avec Michel Pavon aucun rapport) qui précipite la chute de Perez et de la nécessaire transition opérée par Ramon Calderon. Son rendement demeure faible pour un tel joueur même si, en 2006-2007, il score lors de rencontres capitales pour la conquête du titre.

Cependant, de 2007 à 2009, il réalise 2 saisons à 18 buts en Liga. Son influence dans le vestiaire est totale voire envahissante pour les différents Mister venus sur le banc de Santigo-Bernabeu. Leurs destins sont souvent liés à la cote d'amour dont ils jouissent auprès d'El Siete. A chaque fois que l'on a cru Raul cuit pour le haut niveau, il est revenu et a poussé des cadors vers la porte comme Van Nistelrooy bien qu'il soit très ami avec le Batave.

Seul ombre au tableau du crack: la sélection espagnole. En effet, s'il est le meilleur buteur de l'Histoire de la Roja, el Mono Aragones refuse de le prendre pour l'Euro 2008 remporté par la nouvelle génération, celle des Xavi, Iniesta, Torres et Villa.

Au terme de sa carrière, le palmarès de Raul est juste impressionnant. Meilleur buteur de l'Histoire du Real Madrid (325 buts en 743 matches) devant le Merengue du Siècle Alfredo di Stefano, meilleur buteur de la Roja (44 buts en 102 sélections), meilleur buteur de l'Histoire de la Champion's (66 buts en 129 matches disputés), meilleur buteur de l'Histoire de la Liga joueur ayant le plus de fois porté la tunique blanche (l'ancien record était détenu par Manuel Sanchis fils soit 710 matches), meilleur buteur madrilène lors des clasicos sontre le Barça (15 buts contre 14 pour Di Stefano),une moyenne proche d'1 but tous les 2 matches sur l'ensemble de sa carrière professionnelle.
Au plan collectif, il a remporté 6 Liga (peut-être 7 d'ici le mois de mai), 4 Super Coupe d'Espagne, 3 Champion's, 2 Coupes intercontinentales et 1 Super Coupe d'Europe.

Ce 24 avril 2010, quand Raul Gonzalez Blanco quitta la pelouse de La Romareda de Zaragoza en pleurs, c'est bien plus qu'un simple joueur de football qui tira sa révérence. C'est une légende.

Floréal Dal Canto

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