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mardi 24 novembre 2009

Une équipe de légende: l'Espoir Club Boretti juin/juillet 1998.

Si vous ne vivez pas dans le Sud de la France, il est fort probable que vous ne connnaissiez pas l'épopée mythique de l'Espoir Club Boretti lors de l'unique édition de La Mondialette en juin/juillet 1998.

Organisée par le Conseil Général des Bouches-du-Rhône pour célébrer le Mondial 1998, la Mondialette rassembla les plus grandes équipes amateurs de Marseille. Ainsi, étaient conviés à férailler sur tous les terrains de la cité phocéenne, des équipes aussi prestigieuses que l'Union des Footballeurs Bouchers, les Cigales Olympiques, le Royal Football Club, l'Amateur Football Club et l'Espoir Club Boretti.

Alors que l'ECB est menacé de disparition, Francis Boretti, fils du Légendaire Gaston qui a créé, présidé et entraîné le club pendant plusieurs décennies, décide avec ses amis Zé et Mèu d'inscrire son équipe au prestigieux tournoi. Désespéré de ne trouver aucune solution administrative pour sauver l'oeuvre de sa vie, Gaston Boretti reste, pour sa part, en dehors de cette initiative qu'il juge pour le moins farfelue et utopiste.

Alors que son père s'est fait tout au long de sa vie une fierté de former des joueurs doués techniquement année après année, Francis entreprend un travail harassant de recrutement à travers toute la ville avec comme objectif de trouver les 13 participants à l'aventure.

Grâce à quelques connaissances d'enfance et à des choix judicieux lors d'une training session, l'Espoir Club Boretti a fière allure. Jugez plutôt: Michel dit "le Sourd", Eros, Bob Blanco, Maké, Girardy, Lulu (non présent lors de la fâmeuse training session car retenu aux Baumettes ce jour-là), Doumé dit "le Corse", Toinou, Zé, Mèu et, bien sûr Francis. Cependant, l'équipe a un point (très) faible: le poste de gardien de but est tenu par le Théo affectueusement surnommé "le Fils Anguiller" ou "L'Anguiller" en raison de sa filiation avec le poissonnier parisien du quartier. Pour faire court, l'Anguiller est doté d'une frappe inversement proportionnelle à sa faculté à arrêter les ballons. Plus clairement, c'est une banane. Intervient alors Louis, ancien journaliste rouquin, qui tente désormais de se faire une place au soleil dans le milieu inpitoyable des agents de joueurs. Grâce à un tuyau de son ami Pascal Olmeta parti récemment pour une détection en Mongolie, il parvient à faire signer pour la maudique somme de 50 000 Francs, payée en quasi-totalité par la vente à Dédé "j'achète tout content" de la voiture Panther de Girardy qui avait promis de -je cite- "ne plus demander d'argent à papa", la vedette de l'Etoile d'Oulan-Bator, j'ai nommé Igor Prigoune. Bien que chiffrant moins d'1 mètre 60 sous la toise, Igor est un gardien d'exception dont la particularité est d'atteindre son meilleur niveau après avoir ingurgité 26 verres de pastis.

Lors du premier match à élimination directe, l'ECB doit affronter la redoutable équipe de l'Union des Footballeurs Bouchers dont le style de jeu est considéré par Gaston himself comme "raide".
Grâce à un sens de l'anticipation hors-norme des joueurs de l'ECB qui avaient prévu d'emporter dans leurs sacs des crampons vissés et un micro-climat réalisé conjointement, selon des témoins qui voient vraiment le mal partout, par un tuyau d'arrosage, Zè, Lulu et Doumé, les protégés de Francis, indisponible en raison d'une blessure contracté à l'entraînement à cause des échauffements de l'Anguiller qui veut jouer goal-volant, se balade sur le terrain et le match est une promenade de santé (5-0). Pour preuve, même Toinou, créateur de l'entreprise spécialisée dans la visite de Marseille "Toinou tour", inscrit un pion tout en glissant dans la boue, qu'il qualifia à chaud de "méchant de but".

Au deuxième tour, l'ECB a pour mission d'affronter le Royal Football Club. Supérieur techniquement et physiquement, des mauvaises langues affirment que Maké, garagiste de son état, aurait tenté de trafiquer le bus adverse. La légende veut qu'il se trompât de bus. Sans surprise, le RFC se dirigeait vers une victoire aisée notamment provoquée par le fait qu'Igor, oublié par le bus et amené au stade par une camionnette estampillée "Pastis de Marseille", avait bu bien au-dessus de sa dose limite. C'est à ce moment qu'Ines, doté d'un charme qui ne laissait pas Eros indifférent, confia, selon les dires de personnes médisantes, à un admirateur présent dans les gradins un équipement du RFC avec pour mission de jouer le rôle du 12ème homme sur la pelouse. Ignorant la manoeuvre sournoise de la soeur de Girardy (oui comme les médicaments), Francis posa une réclamation qui permit à l'ECB de l'emporter sur tepis vert. Il faut dire que l'argument ultime de l'entraîneur du RFC était texto "c'est une erreur", ce à quoi Lulu répondit plein d'à propos "c'est toi l'erreur cono!".

En demi-finale, face à l'Amateur Football Club, Eros eut le ballon de la prolongation au bout de la tête. Mais, en raison, d'une peur viscérale de se décoiffer alors qu'il a mis le gel, Eros frappa mollement de la poitrine et précipite la défaite de l'ECB.
Alors que le désespoir gagnait les rangs de l'ECB et que la famille Boretti se préparait déjà à voir se contruire une piscine en lieu et place du terrain, Louis découvre que des joueurs professionnels ont été incorporés dans l'équipe de l'AFC, chose totalement interdite. Contre attente, Momie, responsable de la buvette du club, découvrit le lendemain matin dans l'édition de La Provence des Sports que l'ECB avait gagné le droit de disputer la finale du tournoi.

La finale inespérée s'annonçait sous les meilleurs auspices: Francis était enfin rétabli de sa blessure et Gaston avait décidé de retrouver le chemin du banc de touche.
Cependant, Madame Delajette, directrice de l'entreprise de BTP à qui le marché de la construction de la future piscine fut octroyé, réussit à corrompre la quasi-totalité de l'ECB y compris Zè, le meilleur ami de Francis.
Par ailleurs, elle menaça de ressortir une affaire de corruption datant d'un dizaine d'années et dans laquelle Francis fut injustement impliqué si celui-ci jouait la finale.
La première mi-temps livrée par l'ECB face aux Cigales Olympiques fut d'une indigence crasse. Menée au score, la défaite semblait inévitable. Parti se rafraîchir à l'extérieur du vestiaire, Zè fut sévèrement sermoné par sa femme. Or, Francis entendit la confession de son ami d'enfance. De retour au vestiaire Francis, épaulé par son père, tenta de remobiliser ses joueurs. Après un discours fort émouvant de Gaston, Igor se lança dans une tirade en russe achevée par un sonore "Na zdarovia" (à ta santé).
A peine revenu sur la pelouse, les joueurs de l'ECB entonnèrent la main sur le coeur l'hymne des Borettiens "Passe passe passe ton ballon; qu'on qu'on qu'on le mette au fond" (les vers 3 et 4 qui ne furent pas chantés ce jour-là sont "Fais-moi un centre que le rentre; de la tête ou du pied, l'ECB va gagner").
Comme par miracle, l'ECB retrouva instantanément ses qualités collectives qui firent sa force tout au long de l'épopée. Malgré l'épée de Damoclès au-dessus de lui, Francis, encouragé par Gaston, entra en scène à la place de Michel blessé. Grâce à un toque qui déstabilisa la défense des Cigales Olympiques, Zè puis Eros de la tête (!) permirent d'arracher au bout du suspense la séance des tirs au but.
Jaloux de s'être fait chouraver sa place par Igor, l'Anguiller remplit la gourde du "fâmeux goal Mongol" d'eau au lieu de la remplir de pastis. Malgré ce désagrément et poussé par l'amour de Lena, la soeur de Maké dont il est éperdument amoureux, Igor trouva la ressource physique pour stopper le cinquième tir.
A la surprise générale, Francis choisit l'Anguiller, pour achever la série, persuadé que, malgré la forte odeur de poisson qu'il dégage, celui-ci avait toutes le capacités pour faire la différence. Après un crachat d'une densité remaquable, l'Anguiller réalisa le contre-pied parfait et permit à l'Espoir Club Boretti de remporter la Mondialette.

A n'en pas douter, cette victoire fut un exploit retentissant dans l'Histoire du football. Désormais, le Stade de la Remoulade derrière le Mamouth (le pastis, le Ricard) est un lieu de recueillement pour les milliers de nostalgiques de cette époque. Un temps où le beau jeu rimait avec "oh mais tu pues toi oh" et "oh le Corse, tu me prêtes le savon!".

Floréal Dal Canto.

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