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lundi 1 novembre 2010

Brest accentue les regrets arlésiens

La thèse et son antithèse. Promus lors de la saison dernière, Brest et Arles connaissent des destins radicalement différents. Dans une ville sevrée de ballon rond depuis près de 20 ans, les Bretons se sont remis à rêver et croquent dans l'aventure à pleines dents. A l'inverse, les Acéistes ont fait exactement tout ce qu'il fallait pour se prendre le mur en pleine poire. Symbole de simplicité et d'anti foot-business, l'AC Arles a sombré dans la suffisance et a vu sa cote de popularité décroître quand celle des Brestois devenait exponentielle. Après 11 journées, le reflet est sans équivoque, Brest caracole en tête de la Ligue 1 tandis qu'Arles n'en finit plus de se la jouer Titanic.

Il ne sert à rien d'épiloguer sur l'été mouvementé des Arlésiens. Jean-Marc Conrad était loin d'attirer tous les suffrages parmi le conseil d'administration et son éviction était pressentie de nombreux mois avant la fin de saison en Ligue 2. Après tout, un changement de président peut être bénéfique, dans la mesure où une volonté existe. Las, le coprésident Salerno s'est cru connaisseur de ballon et a transformé l'ACA en Football Manager grandeur nature. Passant outre les volontés de Coach Estevan, la présidence bicéphale et Fabrice Bertone, le directeur sportif depuis les années National, ont recruté à outrance, de préférence des joueurs blessés ou en fin de carrière. Mauvaise pioche: ce qui avait fonctionné en L2 (22 arrivées) n'a pas du tout fonctionné une fois passé le cut. Victime toute désignée, Michel Estevan est salement viré avant la réception de l'OM. Ou comment détruire une image (d'Epinal certes) de club familial et sympathique.
L'image du club se dégrade un peu plus face à Auxerre quand Piocelle saute le grillage du Parc des Sports pour en découdre avec les supporters.
Aux antipodes de ce tintamarre, Brest a conservé son ossature, recrutant peu mais avec à propos. Club au passé particulier qui a vu des grands noms fouler sa pelouse (Bernard Lama, David Ginola, Corentin Martins entre autres), Brest a, en quelque sorte, "pris" la place d'Arles dans les coeurs. Ainsi, Alex Dupont est devenu Sir Alex et a eu droit à une longue entrevue dans le So Foot de septembre. Fut un temps, c'était la gouaille d'Estevan qui était louée (comme les poulets fermiers)...

Après le départ d'Estevan, Marcel Salerno a fait appel au Bosniaque Faruk Hadzibegic pour redresser l'équipe. A l'arrivée, que voit-on? Hadzibegic fait les mêmes choix qu'Estevan tant dans le choix des hommes que dans les choix tactiques. Alors qu'Estevan était contraint d'aligner "les choix du président" (Basinas, Planté, Fanchone notamment), Hadzibegic aligne l'équipe qu'il souhaite. Ainsi, Aït Ben Idir, recruté sur demande d'Estevan, est titulaire, Ayasse est revenu dans la rotation et Merville a pris la cage. Mieux, le Bosniaque a inauguré les soldes d'hiver en renvoyant Basinas, un des franchise player choisi par Salerno, dans ses pénates. Une manière de clairement marquer son territoire.

Les Bretons le prouvent depuis le début de saison: avec un état d'esprit combatif et une équipe qui tient la route, ils ont pris le leadership du championnat. Avec seulement 11 cageots en 11 journées mais seulement 4 buts encaissés, il n'en faut pas davantage pour prendre les points. Avant le passage intermédiaire au tiers championnat, Brest a déjà glané 21 points, soit la moitié du chemin qui mène au maintien assuré.
De son côté, l'AC Arles peut se targuer d'avoir le meilleur gruyère de France. Malgré quelques progrès face à... Brest et Lyon, le backfour a rechuté sur le synthétique lorientais. Si, en plus, l'attaque est inexistante, ça vous fait un joli -19 à la diff' de buts et 2 points au compteur. L'erreur arlésienne est de n'avoir pas fait confiance aux joueurs qui avaient participé à la montée, en tête desquels Romain Elie et Romain Reynaud.

Last but not least, Arles n'est pas une ville de sport. Tout l'inverse de Brest. Il suffisait d'entendre l'émotion dans la voix des supporters brestois après leur victoire sur Sainté pour le comprendre. Cette ville attendait le retour de son équipe au sein de l'élite. L'engouement suscité ne peut qu'encourager les joueurs.
Arles ne s'intéresse pas ou très peu au sport. L'AC Arles fait figure d'anomalie dans le paysage sportif local. Le sport professionnel semble être mal perçu. Alors imaginez le football! Pourtant, la demande est là. Le groupe pour la construction d'un stade a rassemblé près de 4000 personnes en moins de 2 semaines sur Facebook sans que cela soit considéré avec plus d'égard par la municipalité. De la même manière, il a fallu attendre le mois de septembre pour voir la création d'un centre de formation. Un centre de formation en carton puisque la Plaine des Sports est une...Arlésienne. Aux dernières nouvelles, les fonds auraient été débloqués mais il a fallu le temps! Et il faut encore attendre la livraison des 4 terrains promis (2 en herbe, 2 en synthétique)... Comment vouloir créer un club solide si la mairie n'espère que sa chute? L'appui n'est pas suffisant alors que la présence d'un club de football en Ligue 1 pourrait entraîner de nouvelles perspectives. Avignon l'a bien compris et, tout en aidant le club à avoir un stade correct, profite des retombées économiques que cela engendre. De la même manière que la Cité des Papes, Brest a réalisé un agrandissement du Stade Francis Le Blé pour correspondre aux normes Ligue 1.

Là où il y a une volonté, il y a un chemin disait De Gaulle et Arles a une volonté en adéquation avec son classement. La lutte des egos a déjà coûté la saison aux Acéistes et il ne fait aucun doute que la curée ne tardera pas. Alors que le vestiaire s'est déchiré au moment du départ de Coach Estevan, Brest fait preuve d'une solidarité exemplaire qui suffit pour faire bonne figure. Les supporters arlésiens ne demandaient pas la lune et savaient que le maintien serait difficile. Ils ne demandaient que du courage et de l'honneur. Certes, la saison est encore longue et il n'est pas trop tard pour relever la tête. Cependant, la réussite brestoise ne peut qu'accentuer les regrets et l'amertume des Arlésiens.

François Miguel Boudet

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