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mercredi 23 juin 2010

L'échec du football africain

Pour la première Coupe du Monde disputée sur le sol africain, six équipes avaient comme mission de faire honneur au continent noir. Las, en dehors du Ghana qualifié par la petite porte, on ne peut pas affirmer que le football africain soit sorti de cette phase de poules. Autopsie d'un échec annoncé quand on connaît un minimum le ballon et qu'on ne regarde pas les reportages de Téléfoot.

La Coupe d'Afrique des Nations l'avait auguré: le football africain est en perte de vitesse. Matches faiblards, joueurs à la technique réduite, sens tactique et collectif insuffisant et enfin, une victoire finale de l'Egypte... non qualifiée pour le rendez-vous mondial.
La Côte d'Ivoire, l'Algérie, le Ghana, le Nigéria, le Cameroun et l'Afrique du Sud (non présente à la CAN) avaient encore 5 mois pour se mettre au niveau.

Mais, en Afrique, tout peut changer au gré des états d'âme des dirigeants nationaux. Coach Vahid prend la porte en Côte d'Ivoire ainsi que Amodu côté nigérian. Paul Le Guen et Saadane sauvent leur peau in extremis. Seul Rajevac, entraîneur des Black Stars ghanéennes est maintenu sans trop de soucis.
Comment construire une identité de jeu sans continuité? En 75 jours, comment créer une tactique viable et performante?

En Côte d'Ivoire, la fédération n'a rien eu d'autre comme idée que de choisir Sven-Göran Erikson. Superbe! Pour ceux qui ne connaissent pas le personnage, le Suédois a un palmarès long comme le bras et un fameux coureur de jupon. Le problème, c'est que son dernier titre date de 2001, un Scudetto avec la Lazio. De plus, on ne s'offre pas Erikson, on se le paye. Et cher. Autrement dit, pour une pige de moins de 3 mois, il a demandé un appart' de fonction en plein London, le plus haut salaire versé à un coach d'une sélection africaine et un carte de crédit no limit! C'est la crise mes amis!
Pour lui faciliter la tâche, les Eléphants ont hérité du groupe de la mort avec le Brésil et le Portugal et Drogbiche s'est cassé le cubitus 1 semaine avant le début de la compétition. Si en plus, vous préférez jouer avec Dindane (mix improbable entre une dinde et un âne) plutôt que Gervinho et sa coupe de cheveux révolutionnaire, inutile d'expliquer davantage pourquoi la Côte d'Ivoire est allée droit dans le mur.
Après un match solide défensivement face au Portugal, les Eléphants n'avaient tout simplement pas le niveau face à des Brésiliens en slow motion.

Le Nigéria a une génération à mille lieues de celle qui brilla au Mondial ricain de 1994. Pourtant, sous les ordres de Amodu (sans Mariam), les Super Eagles finirent 3ème de la CAN. Pas suffisant pour sa fédé malgré les bourrins qu'il avait réussi à faire jouer à peu près comme une équipe. Par ici la sortie! Pour le remplacer, les dirigeants locaux (rien à voir avec Patrice) ont opté pour la "solution" Lars Lagerbäck (ça se dit La-yèr-bèk). Soit un type ancien sélectionneur de la Suède qu'il n'a pu qualifier pour le safari en Af Sud et qui n'a jamais mis les guiboles en Afrique! Le Nigéria, sans surprise, a été éliminé au bout de 2 matches, incapable de taper la Grèce et son jeu toujours aussi immonde. Des visionnaires les instances nigérianes!

L'Algérie de Rabah Saadane n'a pas démérité mais force est de constater que, bien que sympathique, sa participation était peut-être prématurée. L'absence de Meghni a été préjudiciable au niveau du jeu offensif. Incapables de scorer le moindre pion, les Fennecs n'ont pu réussir l'exploit de se hisser en huitièmes. Et sans réalisme point de salut! Félicitations tout de même à Rabah Saadane qui a repris une sélection en lambeaux pour l'amener en Afrique du Sud au nez et à la barbe des Pharaons égyptiens. Ce n'est pas un mince exploit.

On pourrait également citer le Cameroun mais avec Paul Le Guen comme sélectionneur, les Lions Indomptables ne pouvaient guère qu'espérer une mort tragique contre un mur ou un platane sur une route de campagne.

Le football ghanéen, s'il a cédé lui aussi aux sirènes du "sorcier blanc" avec Rajevac, est le seul d'Afrique à s'être doté d'une véritable structure pour ses jeunes. Au final, le Ghana est champion du monde des moins de 17 ans et des moins de 20 ans. En janvier dernier, les Black Satellites ont plié le Brésil en finale, excusez du peu. Et c'est justement sur ces minots que s'appuie le Serbe. Ainsi, malgré l'absence d'Essien et la méforme d'Appiah, les Black Stars se sont extirpés d'un groupe homogène et ce en dépit d'un manque de réussite au plan offensif (seulement 2 buts en 3 matches et sur penalties). Andre Ayew et Asamoah Gyan assurent l'ambiance dans le camp adverse tandis que Mensah et Sarpei dézingue à tour de bras les assauts adverses, bien aidés par Kingson qui s'affirme comme étant l'un des meilleurs gardiens africains. Ce n'est pas Thomas Nkono ou Jacques Songo'o ni même le vétéran El Hadary mais il a prouvé sa solidité dans les moments chauds, notamment lors de ce duel remporté face à Özil.
Cependant, le Ghana aura fort à faire face au Team USA qui paraît mieux armé pour parvenir en quart.

Finalement l'Afrique du Sud, que l'on attendait au ras des pâquerettes, a chèrement vendu sa peau. Mieux, les Bafana Bafana ont battu les Bleus et n'ont été éliminés qu'en raison d'une différence de buts plombés par la défaite face à l'Uruguay (3-0). Loin d'avoir été ridicules, les Sud Africains ont prouvé leur valeur et sortent de la compétition la tête haute. Peut-être qu'avec un Pienaar plus en verve et moins fatigué de sa saison avec Everton, les Bafana Bafana aurait très bien pu s'offrir un 1/8 de finale historique face à l'Argentine.

Sur 6 représentants, seul le Ghana aura l'honneur de défendre le continent africain. Cette qualification est méritée même si la qualité de son jeu n'est pas des plus flamboyante. Si l'Afrique veut un jour gagner le Mondial, il faudra impérativement que les fédérations choisissent de préférer la stabilité avec des entraîneurs locaux plutôt que de changer de sélectionneur tous les 10 jours. L'Afrique doit s'inspirer de l'exemple ghanéen en matière de formation des jeunes afin de développer un esprit vainqueur.
Malgré le Ghana, cette Coupe du Monde aura été un échec cuisant pour l'Afrique. Beaucoup espéraient un titre mais, en réalité, ce Mondial doit symboliser une prise de conscience par les instances africaines du gouffre qui séparent les équipes africaines des équipes sud-américaines et européennes. Sans cela, l'Afrique ne dépassera jamais les quarts de finale.

Francesco della Nuejouls

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