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mercredi 3 août 2011

L'argent n'a pas d'odeur

Analepse en décembre 2010. Contre toute attente, déjouant tous les pronostics, le Qatar remporte l'organisation du Mondial 2022. Un terrible pied de nez adressé à la Perfide Albion, ultra-favorite et broyée dès le premier tour de l'élection de la Coupe du Monde 2018 gagnée par la Russie -un truc à faire de la peine à Lionel Jospin-, ainsi qu'à la péninsule ibérique vaincue par l'émirat. S'en suivit un tollé général du monde du foot. Comment cela? Le Qatar? Un pays sans culture footballistique, aux stades vides, un championnat corrompu géré par des émirs à coups d'arrangements entre amis et de pétro-dollars?
Porte-parole de la candidature qatarie et caution ballon rond de l'émirat, Zidane avait été traité -à tort ou à raison- de tous les noms pour avoir été grassement payé, à hauteur de 12 millions d'euro alors que l'Espagne, pays dans lequel le double Z vit depuis dix ans, présentait une candidature jointe avec son voisin portugais.
Bref, le Qatar n'a pas bonne presse, surtout en France où l'argent a toujours eu mauvaise réputation.
Pourtant, dans un pays où l'identité nationale dispose de son propre ministère, où le Président de la République avait fustigé les salaires exorbitants des joueurs en janvier 2010, voilà que le Qatar fait une arrivée remarquée en Ligue 1. Et pas n'importe où: au PSG, le club de la capitale! Et pas grâce à n'importe qui: Nicolas Sarkozy himself!


Les gazettes hexagonales sont intarissables sur le sujet. L'arrivée de Javier "El Flaco" Pastore est l'événement majeur du mercato français. Acheté 43M€ à Palerme, le meneur de jeu albiceleste est LE grand joueur que Leonardo, tout nouveau directeur sportif du PSG, rêvait d'attirer afin de montrer son savoir-faire aux nouveaux investisseurs. En plus de l'Argentin, Paris a obtenu les signatures de Bisevac, Sirigu, Momo Sissoko, Ménez, Matuidi, Douchez Gameiro bien que les arrivées des deux derniers furent conclues avant le départ de Robin Hood Leproux de la présidence. Au total, plus de 80M€ ont été dépensés en un mois. De quoi faire largement figure de favori pour un titre de champion qui lui échappe depuis 1994.

Etonnante cette mansuétude vis-à-vis des investisseurs moyen-orientaux. Il n'en fut pas toujours ainsi. Bertrand Delanoë, maire de Paris, et Chantal Jouanno, ministre des Sports, ne voyaient pas l'arrivée d'éventuels repreneurs venus du désert d'un très bon oeil. Sauf que quand le Chef de l'Etat a décidé d'aider son club de coeur, ils ont dû, d'une manière ou d'une autre, assurer le Service Après Vente. Moins drôle qu'avec Omar et Fred. Une pilule finalement pas trop douloureuse à avaler puisque le PSG est une marque mondialement connue dont la réussite doit aller de paire avec son surnom de "Ville Lumière". De plus, un retour sur le devant de la scène redorerait le blason d'une Ligue 1 barbante au possible dans laquelle les bons joueurs sont fustigés au détriment des gros bourrins qui dégagent en touche plutôt que de produire du jeu. Par la même occasion, la Ligue est tout contente de cette arrivée providentielle qui pourrait bien réévaluer les prix des droits télévisuels. Une bien bonne raison de se faire greffer les yeux de Ray Charles. Ou de Gilbert Montagnié au choix.

Il faut dire que vu les sommes astronomiques déboursées par les Qataris, les réticences initiales se sont vites évaporées. Spécialiste inter-continental des coupes nationales, le PSG aspire à mieux. Et rapidement de préférence. Très rapidement. Depuis ses deux finales de Coupe des Coupes en 1996 (remportée) et en 1997 (perdue salement face au Barça), Paris n'a plus vraiment fait vibrer les foules,ou par intermittence avec Ronnie, et le souvenir du PSG/Real Madrid est de plus en plus lointain. Du coup, en dépit des craintes, l'origine des fonds, l'existence d'une culture foot au Qatar et les aspirations encore inconnues des nouveaux proprios passent au second plan. Idem quant à leur nationalité voire leur religion, ce qui est assez savoureux il faut bien l'avouer.

Dans un club où les media ont davantage insisté sur ses déboires avec des supporters que sur ses résultats sportifs, l'arrivée des pétro-dollars est une manne plus que bienvenue. Les ventes d'abonnements s'envolent, ramenant sa cohorte de Footix qui crachaient sur le PSG quand tout allait mal, les media et les publicitaires suivent de concert, ravis de retrouver, du moins en partie, l'esprit show-biz qui animait les tribunes de temps de Daniel Hechter et de Francis Borelli. La mutation express du PSG aura au moins eu le mérite d'abolir quelques barrières et de faire entrer la France dans le football du XXIème siècle. Surtout, cela a prouvé que quand tous les intérêts convergent, les billets verts perdent de leur olfaction. Et l'époque où les Français fustigeaient Chelsea, City et Malaga disparurent comme par enchantement.

Pour ceux qui souhaitent se remémorer quelques papiers sur le sujets:

Francesco della Nuejouls

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